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Les baskets rouges ou comment se chausser des attentes de l’autre ?

Grand nettoyage de printemps et premier constat ; les chaussures de ma fille sont maintenant trop petites ; ou, dirons-nous plutôt, que ses pieds ont grandi…

Quoiqu’il en soit, il est nécessaire d’adapter la chaussure au pied (chaque pot a son couvercle, chaque pied a sa chaussure). Nous sommes en route, le cahier des charges est fixé ensemble :

Pas de voute plantaire ; des chaussures fermées et « si elles sont rouges, cela serait formidable ». Pas de stress, le programme est rodé, nous avons le temps de prendre le temps. Arrivées au magasin , nous voici face à un vendeur tout aussi charmant que compétent qui nous dirige vers les chaussures de rêves : rouges, fermées, sans voute plantaire et en pointure 27. Tout est parfait. Voyant le regard tant rassuré que ravi de ma fille, il s’est empressé de lui rajouter l’argument choc aussi incontournable que célébre : « et tu sais, celles-là, elles courent très vite ! » Réponse spontanée de ma fille, « ce ne sont pas les chaussures qui courent , c’est moi ! Et si j’ai envie ».


Alors là ; merci ma fille pour cette délicieuse réponse.

Je me suis penchée quelques instants sur cette phrase et sur sa récurrence comme argument à la péremption redoutable lors de tout achat de chaussures pour un enfant de moins de 10 ans.

A quoi sert réellement cette phrase ?

A couper court à toute vaine tentative de rejet dudit soulier ? A justifier é-honteusement la sélection de la paire de grolle par un argument aussi infondé que non corroboré ? Quel est l’impact réel de cette phrase ?

Sous-entend elle que notre enfant a besoin de courir plus vite ? Plus loin ? Après quoi ? Que cette paire de godasses va héroïquement et avantageusement lui servir pour palier à une quelconque infériorité que nous ne saurions souffrir plus longtemps? Est-elle destinée à éveiller en lui la nécessité d’entrer prestement dans le monde de la concurrence et de l’escalade vers la gagne ?

Et si demain on nous proposait des baskets rouges… Faudrait il les accepter car « elles courent très vite ? »

Beaucoup d’entre nous portent des baskets rouges « qui courent vite ». Ce sont les valeurs et les pressions sociales ou familiales. Ce sont les messages et ancrages lourds de responsabilité et de devoir que l’on nous a souvent forcés à porter car « c’est comme ca », et « c’est pour notre bien » et car « ce sont les parents qui décident », ou « ca fera plaisir à tata ». Souvent, ces baskets rouges font mal aux pieds. Nous avons aussi des baskets rouges « tout court ». Celles que nous avons choisies ou acceptées car nous connaissons leurs qualités et leurs défauts. Ce sont nos socles de développement personnel ; Nos fondations, nos fonctionnements, nos valeurs et nos leviers de motivation.

Ce qui compte ce n’est pas l’outil, c’est ce qu’on en fait. Choisissez bien vos baskets, c’est plus dur d’avancer quand on a mal aux pieds 😉

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